[One Shot] Le Bourbier

Un garde de nuit baîlla nonchalamment. Il ne faisait pas trop froid, cependant il secoua tout de même ses muscles, fit quelques échauffements d’épaule avant de reprendre son poste, le dos plaqué contre un mur de béton. Il n’avait que la lumière publique pour observer les alentours du bâtiment sur lequel il prenait place, c’est-à-dire une allée étroite derrière une grille qui traçait le contour du lieu de manière rectangulaire. Peu de chose à regarder, peu de chose à en retirer, que ce soit la place plane de bitume qui servait de parking à la base, du petit poste de contrôle où la personne devrait se trouver au lieu de prendre l’air, ou de l’immeuble long d’une dizaine d’étage dans lequel il ne savait pas du tout ce qui se produisait à l’intérieur. Tout cela, tout en regardant aux alentours avant de tirer une cigarette de sa poche, il s’en fichait royalement.
Il regarda sa montre. Il était 2H42 du matin. Il laissa tomber son futur mégot de sa bouche, avant de l’écraser. Il se retourna pour remonter dans son antre d’observation, lorsqu’il sentit quelque chose lui piquer la nuque. D’un geste naturel, il toucha l’endroit ciblé, et se rendit compte que la chose derrière sa nuque était loin d’être un simple insecte, mais plutôt un objet ayant la forme d’une fléchette. Il n’eut que peu de temps pour réagir, jusqu’à ce qu’il s’écroula lourdement. Le silence s’imposa, jusqu’à l’arrivée d’une ombre proche du corps. Celle-ci examina le corps, notamment les poches. Tout son corps était recouvert d’une tenue assez moulante, entièrement noire, sans aucune trace de fermeture. La formation de son corps laisserait paraitre un jeune homme d’âge jeune, Il continua de fouiller le garde assoupi jusqu’à trouver de quoi l’intéresser : son badge de gardien. Le sombre laissa le corps et se dirigea devant l’entrée de l’immeuble.
Ce mystérieux personnage avait une drôle de manière de ranger ses affaires, car la carte trouvée précédemment s’enfonça dans ce qu’on pourrait considérer sa peau avant de disparaitre complètement dans ses tréfonds. De plus, ses mouvements de corps ne ressemblaient pas vraiment à une gesture humaine. Le corps semblait glisser vers l’avant, mimiquant des mouvements de jambes alors que la partie supérieure ne bougait seulement les bras, Son tronc restant parfaitement droit. Devant la porte, il ressortit une carte différente de celle du gardien. L’être n’eut aucun mal à ouvrir et à entrer dans les lieux.
Il entra dans une sorte de hall plutôt espacée. Surprenemment aucun signe de vie ne se fit entendre à l’intérieur. Et aucun mécanisme de sécurité n’avait l’air d’être mis en place. Cela ne gêna pas tant que ça l’intrus et explora les environs. Ou du moins, il avait une idée d’où se déplacer dans ces locaux. Il prit l’ascenceur, dans un coin reculé du hall et décida de descendre le plus bas possible. Tandis que la musique d’ambiance alimentait la pièce en mouvement, le corps moulant dans l’ascenceur commença à se déformer de manière inhumaine, un peu comme si l’arrière de sa nuque se disloquait après s’être pris un sacré coup de base-ball. Au niveau de la carotide, des boursouflures commencèrent à s’afficher et à se répandre jusqu’à la totalité du corps. Celle-ci prit une couleur de peau, puis bleutée  et blanche. Ces boules  pigmentés se reclassèrent à la vue et à la forme, jusqu’à sculpter sur la sombre personne une autre entité. Le puzzle se termina rapidement : à la place de la chose, le gardien de nuit se tenait sur ses pieds, dans l’ascenceur. Le regard du gardien, malheureusement, n’était pas d’un bleu ardoise, mais  d’un vide aspirant. L’ascenceur s’ouvrit aussitôt et la voleuse d’entité contiua sa route.
D’une grande salle vide de sens, la chose se trouva dans un endroit bien plus restreint, mais bien plus détaillée. L’éclairage, contrairement au-dessus, était présente. Du bruit survenait au loin du couloir tâchée, délabrée par le temps et puant le fer. De vieilles affiches et posters jonchaient le sol de pierre, où on pouvait décerner certaines notes de “révolution scientifique”. La présence de plusieurs caméras commencèrent à fixer l’intrus, sans que celui-ci ne prêta attention. Enfin, après une certaine avancée, des vitres montraient des salles où des formes de “tas de boue” tentaient de s’échapper en forçant la paroi de verre, en vain.
Il arriva au bout du couloir. Une énorme porte métallique se dessinait devant lui. Il réutilisa la même carte qui lui permit d’entrer dans le bâtiment. Les murs de métal se déplacèrent, laissant afficher un homme chétif dégarni avec des lunettes rondes, quelques rides au visage mais avec un sourire garanti.

“-Alors, comme ça on vient voir papa ?”

Derrière cet homme, un troupeau de choses sombres ayant le même accabi que l’intrus sans son survêtement qui le définit. Ils se battirent dans une arène souterraine, s’aspergeant de leur mucus flasques, sans aucune raison apparente. Un véritale carnage mou.
“-Je suis content de te voir. Cependant, tu comprends qu’avec tous ses petits, j’ai pas mal de travail à faire… Reviens me voir plus-”
Le faux gardien se mit à hurler d’un chant barbare au niveau des aîgus. L’arène stoppa son brouhaha ambiant jusqu’à laisser un silence religieux. L’intrus se mit à vociférer.
“-Ne te fous pas de moi. Rends-moi ce qui m’appartient !”
Le petit homme se mit à rire à gorge déployée. Puis son ton devint crispé.
“-Chassez-le !”